Myriam Mechita,
A Stone is a Stone is a Stone is a Stone
Avec la complicité de Julie Crenn
Au Narcissio
Exposition du 11 juin au 2 octobre 2021
Put something down.
Put something down some day.
Put something down some day in.
Put something down some day in my.
In my hand.
In my hand right.
In my hand writing.
Put something down some day in my hand writing.
Needles less.
Never the less.
Gertrude Stein – Sacred Emily (1913)
A stone is a stone is a stone is a stone. Une pierre est une pierre est une pierre est une peirre. Le titre l’exposition – le détournement du célèbre ver écrit par Gertrude Stein – résonne comme une ritournelle, un mouvement interne où tout est lié, une traversée intemporelle*. Il s’agit d’une plongée. Au cœur de l’exposition se trouve une pierre, ou plutôt un bézoard. Un corps étranger, une curiosité nichée dans l’estomac des humain.es et non humain.es. Une perle d’estomac. Cette pierre, formée dans un temps long dans le corps de Myriam Mechita, est devenue le prétexte et la raison de l’exposition. Elle est à la fois un point de départ et une métaphore concrète d’une pratique artistique dense et incarnée. Enfouie dans sa chair, la pierre est un trésor invisible, inatteignable. La poudre d’un bézoard pourrait atténuer la mélancolie. Il serait un antipoison contre la peste ou le venin de serpent. Présent dans les écrits médicaux perses et arabes, il est comparé à la corne de licorne pour ses propriétés curatives. Il ouvre des portes à la magie, aux croyances diverses, aux mythologies, aux fantasmes, aux vérités et des contrevérités. Ici, il renferme un silence. Celui d’un secret lui aussi invisible, inaudible, impalpable. La petite pierre ronde, polie par le temps, cristallise une histoire dont Myriam Mechita ne détient pas toutes les clés. Elle incarne la mémoire de son corps : des expériences lumineuses s’y heurtent à des traumas reçus en héritage. Alors, la question de la mémoire devient centrale : comment se remémorer ce que nous n’avons pas nous-mêmes vécu ? Ce qui n’est pas raconté ? Comment mettre des images, des matières, des formes sur ces histoires enfouies et silencieuses ? En parlant du trauma colonial algérien, Karima Lazali écrit que les corps portent un impensé puissant inscrit dans leurs chairs*. Un impensé qui évoluent dans une zone blanche où le souvenir est complexe, voire impossible. C’est, entre autres, à partir de cette zone blanche, une zone personnelle et collective, que Myriam Mechita confronte les non dits, les secrets, les silences, les violences sourdes et criantes d’une histoire largement amputée. Elle tente inlassablement de rassembler les corps disloqués. A stone is a stone is stone is a stone est une plongée dans la zone blanche, dans la mémoire du corps de l’artiste et de corps pluriels qu’elle tente de reconnecter entre eux. Les étoiles y croisent l’effroi. La traversée s’alourdit progressivement en signes, en visages, en fragments de corps, en lumières et en obscurités. Par delà le temps, l’espace et les cultures, Myriam Mechita extirpent les images et les corps de l’oubli.
Julie Crenn
LE NARCISSIO
16 rue Parmentier 06100 NICE
T 04 93 84 81 30
Ouvert du jeudi au samedi de 14h30 à 18h30 (et sur rendez-vous)
Sur rendez-vous uniquement du 1er au 26 août 2021.
Entrée libre.
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